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NICOLE BILLARD Profession : relieur d’art.

NICOLE  BILLARD
Profession : relieur d’art.

Par Jocelyne Aird-Bélanger

NICOLE BILLARD pratique le beau métier de relieur d’art depuis trente-cinq ans. Au départ designer graphique, elle entend un jour à la radio, une interview de Simone Benoit Roy où il est question de ce métier d’art très spécialisé. Elle s’inscrit immédiatement à l’atelier «L’art de la reliure» sans se douter que toute sa vie évoluerait dès lors  autour des livres à restaurer, à refaire, à recouvrir, à relier.

Des origines du métier de relieur :
Avant d’aller plus loin, voyons un peu d’où vient le métier de la reliure et plus précisément de la reliure d’art.  L’histoire de la reliure rassemble trois éléments clés de l’évolution humaine : l’invention du papier il y a 2200 ans, celles de la typographie et de la presse à imprimer par Gutenberg au XVème siècle  et celle du livre, support maniable d’information.

Le papier
Le papier a été inventé par les Chinois 200 ans avant notre ère. Sa fabrication resta un secret bien gardé jusqu’en l’an 750, année où les Arabes capturèrent des prisonniers parmi lesquels se trouvaient des chinois, maîtres-artisans du papier. Ce fut la fin des secrets de ce matériau inépuisable. Il fallu tout de même 800 ans de plus avant que les Maures d’Espagne n’adoptent les techniques de fabrication du papier. Les premiers moulins à papier apparurent probablement en Angleterre vers 1496. Avant cela, tous les papiers étaient importés d’Espagne ou d’Italie.

La typographie
L’imprimeur allemand Johan Gutenberg eut le premier l’idée en 1452, de faire chacune des  lettres de l’alphabet sous forme d’un petit bloc de métal de sorte que chaque ligne de texte et chaque page pouvaient être assemblées avec ces petites lettres qui pouvaient être démontés et réutilisés maintes et maintes fois. C’est ainsi qu’il imprima la première Bible à l’aide d’une presse à vis inspirée des pressoirs à raisin qu’il avait inventée en 1447.

La reliure
La reliure moderne a débuté avec le passage des rouleaux continus tels qu’utilisés dans l’antiquité, à la formation de livres à partir de feuilles détachées. Les tout premiers livres étaient composés de feuilles simples de velum, suivies par une feuille de papier, pliées et rassemblées en sections commodes. Les feuilles étaient retenues ensemble en bon ordre en les cousant au travers du pli central sur des bandes flexibles placées à angle droit derrière les feuilles.
Pour protéger les feuilles et les empêcher de gondoler, les premiers livres étaient placés entre deux planches de bois. Plus tard, il a semblé pratique de relier ensemble ces feuilles et les planches de bois. Par la suite, on utilisa du cuir pour envelopper le tout, donnant ainsi aux livres l’aspect qu’on leur connaît aujourd’hui.



Relier au Québec :
L’exposition UNE HISTOIRE DE LA RELIURE AU QUÉBEC fut présentée par Bibliothèque et Archives nationales du Québec à la Grande bibliothèque en 2005-2006. Danielle Blouin, reconnue pour  la polyvalence et  l'étendue de ses connaissances, en était la commissaire. Cette exposition rappelait que jusqu'au 18e siècle, la majorité des livres arrivaient ici de France en feuillets. Ils devaient donc être reliés sur place, soit dans les couvents, soit par des cordonniers qui connaissaient bien le cuir et ce avant que s’établisse une nouvelle génération de relieurs locaux. La première presse à imprimer apparut dans la ville de Québec sous le régime anglais en 1763. La fabrication des livres commença alors  directement sur place.
Le rôle de la reliure est de protéger le livre, d'augmenter sa stabilité et sa durée de vie. De nos jours, la reliure peut être faite mécaniquement ou à la main. Il existe deux types de reliures faites à la main: la reliure courante, travail sobre en toile ou en cuir, effectué pour des bibliothèques, les archives des ministères, les mairies, qui ne fait pas appel à la créativité. Et la reliure d'art ou de création qui répond à un marché plus restreint et qui s'adresse essentiellement aux particuliers, bibliophiles, collectionneurs et artistes.
L'exécution d'une reliure passe par différentes phases successives et très précises, une soixantaine d'opérations en moyenne pour un seul livre. Le travail du relieur d’art est avant tout manuel et fait appel à des matériaux somme toute assez simples : papier, cartons, colles, fils, cordes, toiles, cuirs et parfois cases typographiques. Il s’agit de techniques anciennes qui demandent patience et doigté,  un sens esthétique développé ainsi qu’un équipement précis  mais peu complexe.
Au Québec, le métier de relieur s’effectuant le plus souvent au dans les couvents ou dans des institutions, fort peu de gens le pratiquaient sur une base plus personnelle. Lorsque Simone Benoît Roy revint de Paris en 1969 avec toute une formation acquise auprès de maîtres français et qu’elle ouvrit son école de reliure à Montréal, le succès alla au-delà de ses espérances.
C’est donc auprès d’elle que NICOLE BILLARD et toute une génération de relieurs, reçurent les bases de leur formation. L’atelier de Simone Roy, «L’art de la reliure», se trouvait alors sur le rue St-Sulpice dans le Vieux Montréal. Après s’être un temps associée à  Simone Roy, Nicole Billard ouvrit  avec Monique Lallier  l’atelier «Les relieurs artisans», rue Laurier, atelier qui fonctionna de 1978 à 1983.
On la retrouve depuis 1984 dans son atelier personnel, sur la rive sud de Montréal. Et quel atelier!  Efficace et bien organisé, chaleureux, l’atelier est équipé de manière professionnelle. Certains outils et équipements de son atelier proviennent de sa tante qui était elle-même relieur d’art en France. Une douzaine d’étudiants fréquentent chaque semaine l’atelier Billard. Certains viennent de l’autre côté de l’Ile de Montréal; certains, du Vermont. D’autres reviennent auprès de Nicole Billard depuis des décennies.
Ils ont bien raison car ce relieur a toujours cherché à perfectionner son métier que ce soit en France, à Washington, à Birkellof en Allemagne ou encore lors du Symposium de Groupe Wehmais à Juva en Finlande. Elle fut récipiendaire du prix de  design de l’exposition «Art of the Book 93» remis par le CBBAG. En 1998, on la choisit comme maître-relieur à l’exposition «Maestri Rilegatori per l’Infinito» à Macerata en Italie. Elle faisait partie du Jury pour le CBBAG lors du choix des participants au «Art of the Book 2008».
Nicole Billard enseigne son métier depuis plus de 30 ans dans son atelier  bien sûr, mais aussi pour différentes institutions et programmes spécialisés. Le contact avec les étudiants lui apporte une stimulation et un éventail de projets divers  qu’elle apprécie particulièrement.
L’autre aspect de son travail est la restauration. On s’adresse très souvent à son expertise lorsqu’une cause semble presque perdue. Ces défis l’intéressent au plus haut point et constituent une part importante des contrats qu’elle réalise régulièrement : sa réputation en  ce sens n’est plus à faire.

Pour voir les reliures de Madame Billard qui sont des pièces uniques, il faut consulter la Bibliothèque nationale du Québec ou celle du Canada  qui en ont acquises plusieurs ou encore les nombreux catalogues où ses œuvres sont montrées. Nicole Billard n’est pas une archiviste; ce qui l’intéresse, c’est le prochain projet! Il y a  aussi ses étudiants et ce métier qui la passionne depuis  si longtemps. Son atelier et ses nombreuses expositions et réalisations en sont la preuve. Nicole Billard, une vraie professionnelle de la reliure, rigoureuse et versatile!



Nicole Billard
Profession:  Bookbinder
By Jocelyne Aird-Bélanger

Nicole Billard has practiced the art of fine bookbinding for thirty-five years. Originally a graphic designer, one day she heard a radio interview with Simone Benoit Roy about this highly specialized art.  She immediately enrolled in workshops at «L’Atelier de reliure» without suspecting that a good part of her life would come to revolve around books to be restored, repaired, covered or bound.


In Quebec, fine bookbinding was executed primarily in convents or institutions, with few people practicing it on a personal basis.  When Simone Benoit Roy returned from Paris in 1969 with training acquired from French masters and opened her bookbinding studio in Montreal, her success exceeded her expectations.

Nicole Billard and a whole generation of bookbinders received their basic training at Simone Roy’s studio, ‘L’Atelier de reliure’, on Saint Sulpice Street in Old Montreal. Following her association with Simone Roy, Billard opened the studio ‘Les relieurs artisans’, with Monique Lallier on Laurier Street.  The studio operated from 1978 to 1983.

Since 1984, she has worked in her private studio on the south shore of Montreal.  And what a studio! Efficient, well organized, and warm[CM1] , the workshop is professionally equipped.  Some of the tools and equipment are from her aunt’s studio, herself a fine-art bookbinder in France.  A dozen students, from Montreal and even Vermont, attend weekly workshops. Billard has developed her expertise in France, Washington, Birkellof in Germany and at the Symposium Group Wehmer in Juva, Finland.  She is the recipient of a design award for the exhibition ‘Art of the Book 93’ issued by [CM2] CBBAG.  In 1998, she was chosen as a master bookbinder in the exhibition ‘Maestri Rilegatori per l’Infinito’ in Macerata, Italy.

Billard was a member of the CBBAG jury which selected participants for the ‘Art of the Book 2008’.  She has taught her craft for over 30 years in her studio, of course, but also instructs for various specialized agencies and programs.  The contact with students provides stimulation and a diversity of projects that she particularly enjoys.

The other aspect of her work is restoration.  Her reputation and expertise are well established. Because of her reknown, people sometimes approach her with books almost beyond repair.  These challenges are highly interesting to her and are an important part of the work she produces regularly.

To see Billard’s one of a kind bindings one can either consult the National Library and Archives of Quebec or of Canada where several examples have been collected, or review the many catalogues where her works are shown.  Nicole Billard is not an archivist: the next project is what interests her!  There are also her students and the craft itself for which she has been passionate for so long, as attested to by her studio and numerous exhibitions and achievements.  Nicole Billard is a true professional bookbinder, both rigorous and versatile!

(Translated by Jocelyne Aird-Bélanger with the assistance of Lynn Jackson Gauthier)

Bookbinding in Quebec:

The exhibition A HISTORY OF BOOKBINDING IN QUEBEC  was presented at the Grande Bibliothèque in Montreal by The Library and National Archives of Quebec in 2005-2006.  Danielle Blouin, known for  her versatility and breadth of knowledge, was the curator.  This exhibition reminded us that until the 18th century, most books arrived here from France in sheets.  They were bound locally in convents or by shoemakers who were familiar with leather, long before a new generation of local bookbinders was established.  The first printing press appeared in the city of Quebec in 1763, then under British rule, and from then on production of books began .